Le dîner à Terwagne
P. Dijon
Fin du siècle dernier, trois étudiants de candidature en médecine Louis Noel, Justin Servais et Emile Pasque, envisageaient la façon dont ils fêteraient le Mardi Gras. L’un deux devait se rendre pour dîner chez ses oncles : ses deux amis, sachant que les oncles disposaient d’une merveilleuse cave à vin, demandèrent s’il était possible d’y être invités également. Justin leur répondit que cela était tout à fait impossible car ses oncles étaient d’une avarice rare. Cependant, les deux amis, parièrent avec Justin qu’ils réussiraient tout de même à y venir dîner.
Justin expliqua à ses amis où se trouvait la maison à Terwagne et ceux-ci se procurèrent un plan détaillé de la région, puis des instruments d'arpenteur : une chaîne à maillons, des flèches, des jalons, une équerre d'arpenteur, un niveau d'eau. Le jour de mardi gras étant arrivé, Louis et Emile arrivèrent à Terwagne un peu avant l’heure du repas et se mirent à mesurer et placer des jalons sur le terrain voisin du parc, puis dans celui-ci même. Intrigué, l’un des propriétaires s'approche d'eux : Louis et Emile lui expliquent qu’ils sont chargés de préparer le tracé de la future ligne de chemin de fer vicinale de Clavier vers le Val-Saint-Lambert. Inquiet qu’on ne fasse passer le train chez eux, l’oncle de Justin demande s’il n’y a aucun autre tracé possible et les deux amis lui répondent qu’ils étudient également un tracé situé 350 mètres plus loin : ils devront ensuite déterminer lequel des deux convient le mieux.
Après en avoir parlé avec son frère, le vieil oncle invite les deux géomètres à dîner chez eux. Lorsque Justin arrive, ce dernier conseille à ses oncles de soigner le repas et surtout de bien l’arroser afin d’obtenir que le tracé évite leur propriété. Les meilleurs vins furent servis à table et jamais les frères ne se montrent plus généreux. En quittant la table, les géomètres annoncèrent qu’ils avaient pris une décision −l’autre tracé serait préféré à celui traversant la propriété des frères− et Justin dû bien admettre qu’il avait perdu son pari !